La justice décide qu'un
"ouvrage public" n'est plus indestructible
02/05/2003 12:28 La Cour de cassation a remis en
cause mercredi un principe juridique ancestral qui interdisait au juge
d'ordonner la destruction d'un "ouvrage public" construit illégalement
ou mal placé, a-t-on appris vendredi auprès de la Cour.
Un ouvrage public, qui peut être un bâtiment, une route, un pont, une ligne
électrique ou un égoût, est une construction édifiée par une collectivité ou
pour une collectivité, et affectée à l'usage direct du public ou à un service
public.
En l'espèce, les propriétaires d'un terrain se plaignaient de ce que la commune
de Verdun-sur-Ariège (Ariège) avait construit sur leur propriété, sans plus
d'égards, un château d'eau destiné au captage d'une source pour la
collectivité.
L'arrêt de la Cour de cassation n'autorise cependant la démolition qu'en cas de
"voie de fait", c'est-à-dire en cas de construction manifestement
réalisée sans respect des règles légales. Mais selon un avocat à la Cour de
cassation, qui a souhaité garder l'anonymat, il s'agit d'"une brèche"
dans le principe de non démolition et "on passera ensuite à la possibilité
d'ordonner la démolition sans voie de fait".
Cette innovation fait suite à un arrêt du 6 mai 2002 du tribunal des conflits,
juridiction dont le rôle est de départager, en cas de difficultés, les
compétences des juridictions judiciaires et des juridictions administratives.
Depuis un arrêt du Conseil d'Etat de 1853, le principe était fermement appliqué
au nom de "l'intérêt général" : on ne démolit pas un ouvrage public,
même s'il est "mal planté".
"On peut toutefois s'interroger avec curiosité sur cet intérêt général qui
dispenserait l'administration de respecter le droit", disait cependant le
commissaire du gouvernement, Jacques Duplat, devant le tribunal des conflits
lors de l'examen du dossier jugé en mai 2002.
Le 5 juin 2001, dans le dossier du château d'eau, la cour d'appel de Toulouse
avait appliqué le principe de non-démolition. A tort, selon la Cour de
cassation qui a confié le dossier à la cour d'appel de Bordeaux pour rejuger
l'affaire.